La cervoise du Bon Gaulois

J’ai vu

L’oeil blond

Malin

Un dimanche de fin juin

Se réjouir

D’arriver

Enfin

A ses fins

Là où son père borgne

Avait échoué

Quand toi

Bon Gaulois

Accoudé à ton PMU préféré

Le regard scotché

A ton écran de télé

Naïf ou complètement abruti

Tu as gobé sur BFMTV toutes ses paroles

Comme un mouche

T’ as cru

A cet ange aux yeux bleus

Qui t’sauverait

De ta misère

Tu as cru

A sa générosité diabolique

A sa théorie de comptoir

A son argument à deux balles

L’étranger coupable

De tous tes maux pourris

O Bon Gaulois

Toi qui te délectes

Chaque midi

De délicieux couscous

Toi qui loues les merveilles du Maroc

Les sourires si généreux de leurs hôtes

Toi qui t’enivres des musiques d’Orient à la lune descendue

Toi qui invites la danseuse du ventre nu dans le lit de tes yeux avides

Et qui méprises tous les maghrébins de ton quartier

Les rangeant tous au rang de délinquants

Dealers de faciès

O toi Bon Gaulois

Rempli d’ivresse

Tu prends de la graisse

Saute un peu du pont

Tu seras un peu moins rond

O Bon Gaulois

Tu te justifies

Le fascisme d’hier

N’a rien à voir avec le rassemblement féodal d’aujourd’hui

Pourtant

Dans ses techniques de raccolages

Le rien à foutre néant prend semblable chemin

Et très vite tu déchanteras de ses lendemains prometteurs

Marcher au pas

Et surtout par toi-même

Ne jamais réfléchir

Cocher la bonne case de sortie

Feront le pire de tous tes malheurs

O toi Bon Gaulois

Finis donc ton bon couscous c’est le dernier

Et ta danseuse nue et son joli nombril

Des milles et une nuits

Tu peux vite l’oublier mouillée dans tes mouchoirs

Tu deviendras vite toi aussi un étranger

Si tu ne montres pas l’échine courbée

Ou la main levée à toutes les lois de ta belle sirène

A ses déclarations solennelles

Tu finirais bien dans ses poubelles

O toi le Bon Gaulois

Qui boit bien beaucoup trop de Boulaouane

A la fête des olivettes

Ou dans les bains interdits

Et

Et puis

Quelles sont tes origines d’ailleurs

Tu ne viens pas de notre ville

De notre quartier

Avoue

Bon Gaulois

Tu n’es pas breton

Pourquoi as-tu traversé notre rue de la Gloriette

Pourquoi viens-tu piquer notre pain quotidien

Et puis on n’te voit pas souvent

A la messe de la Madelaine

Le dimanche Bon Gaulois

Plutôt au bistrot du coin

Va falloir corriger tout ça

Et raser ta moustache

Tu troubles l’ordre public

Avec ton pif d’alcoolique

T’es vraiment pas comme nous

Ni la couleur de tes cheveux ni la couleur de tes yeux

T’es même complètement fou

Et puis

On n’voit jamais ton épouse

Et tes mômes

Gaulois

Quoi

T’es célibataire à ton âge

Tu veux voler nos filles

C’est pour ça que t’es là

Ou alors t’es un putain de gay

T’as rien à faire sur notre terre

Dégage de notre paysage

T’as compris

On n’fait pas un dessin

On n’te veut pas de toi même de passage

Ou bien travaille

Va au laminoir

Astique nos rails

Sois notre esclave

Puis rentre dans ton enclave

Et mouche-toi

C’est nous qui faisons la loi

Gaulois

L’oeil veille sur ton minois

Mine d’abruti

Ta vie est en sursaut

J’ai entendu parler cette nouvelle France

Qui s’adressait au vieux Gaulois

Et j’ai vu

L’oeil bleu

Un matin

Se mirer

Dans son miroir

L’autre était crevé

L’enfer l’avait mangé

La nation gauloise fière

N’était plus qu’une cervoise amère

Je l’aurais bien jetée à la mer

Penses-tu que les requins auraient voulu d’elle

Trop de nerfs

Dans son cœur aigri

En son maigre esprit

Dis-moi mon amie que j’ai fait un cauchemar

Quand j’ai lu tous mes écrits

Sur le parvis d’une église

Personne n’a mot dit

Étais-je maudit

Rentré chez moi

Un virus dans mon ordinateur

S’était introduit

Frère c’est l’heure

M’ a dit une voix

Il faut que tu fuis

Alors je lui répondu

L’oeil blond a fondu

Le soleil brille à cette heure

L’amour est aujourd’hui vainqueur

Dans l’urne ce matin

J’ai glissé mon cœur

Remplacé des cendres

Par des braises

Pour éclairer nos âmes goulues

De bons Gaulois

Et pardonne-moi

Si toi ici au PMU

Par mon poème

Je t’ai bousculé

Quand t’as craché ton mépris

Sur l’étranger là venu

C’est juste un enfant en toi que t’as tué

C’est juste la haine que t’as semée

C’est juste un je t’aime

Qu’il t’ faut maintenant retrouver

La cervoise du bon Gaulois

Va au Wattignies

Et bois à une autre vie

Aime

Ca t’changera l’esprit

Ici on chante

Ici on danse

On répare les vélos

On repart de plus beau

On s’rhabille

On s’refait un look

On achète pour pas cher

Ce qui nous fait plaisir

On recycle tout

Rien ne se jette

On sauve même les plantes

Ici le monde on réinvente

Ici tout est bon

Pour rebondir

On a le sourire

Et l’étranger

Est notre meilleur.e ami.e

Alors

A la tienne

Gaulois

Il était une foi

Thierry Rousse
Nantes, vendredi 28 juin 2024
"Une vie parmi des milliards"

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