En visitant « Le jardin de Corinne » à Grosbreuil en Vendée durant l’année 2019, je fus impressionné par la quantité et la diversité des légumes cultivés.
J’appris par Corinne qu’il y avait, auparavant, ici, qu’un pâturage.
Ces légumes ont pu pousser grâce à l’apport d’engrais naturels, le paillage et le travail manuel .
Pas de tracteur, ici ! « Mes outils ce sont mes mains, me dit Corinne, une fourchette et un plantoir ».
Corinne prit le temps de m’expliquer, autour d’une délicieuse tisane, le rôle de la biodiversité. Je découvrais que la limace avait aussi son importance dans le jardin, en mangeant les feuilles de salade abîmées. Chaque être vivant a un rôle à jouer, rendant possible l’existence des autres.
C’est en me promenant dans le jardin de Corinne que j’ai pu définir un fil conducteur pour mon spectacle « Mon Pote Agé ». Théo Brin de Paille ferait visiter son jardin à Barnabé !
Le parcours commencerait par l’eau, cet étang à l’entrée du jardin, surplombant la colline. Une eau si calme, si apaisante où le ciel venait s’y contempler. Au lointain, les collines du bocage vendéen s’offraient à mon regard.
Un peu plus bas, sur la droite, il y avait la « cabane du jardinier » qui était en l’occurrence, ici-même, une femme ayant fait le choix de quitter la ville et son métier de libraire pour cultiver ce pré selon les principes de la permaculture et y vivre.
Derrière la cabane se cachait le poulailler.
Au bout du poulailler, un chemin menait au potager en forme de mandala.
En son milieu, était la cabane du hérisson.
Un peu plus bas, se trouvait le chêne aux abeilles.
Paraît-il que des abeilles étaient venues se réfugier dans une cavité de son tronc.
Le long de la haie, de retour vers l’entrée du jardin, je pus apercevoir, en me plaçant à l’endroit indiqué par Corinne, le visage d’une femme dessiné dans le tronc d’un arbre. Effet d’optique lié à la nature du tronc qui laissait champ libre à mon imaginaire.
Il est arrivé, une fois, qu’on me dise: « Et Théo Brin de Paille, il n’a pas de femme? »
C’est vrai qu’on ne l’entend que s’adresser à cet enfant, Barnabé, et que parler de ses légumes, ses fleurs, son âne, ses abeilles, sa terre, sa fée Clochette…
Et si la femme de Théo Brin de Paille était justement dans cette part de mystère, d’inconnu?
Cette fée Clochette qui le guide, veille sur lui, lui joue des tours.
Cette fée qui le ramène toujours à son enfance.
Et si la femme de Théo Brin de Paille était la nature elle-même, la Terre nourricière, celle qui donne la vie?
Une femme présente en chaque élément naturel qui nous émerveille?
Cette absence apparente de la femme dans « Mon Pote Agé » révèle, au fond, sa présence permanente.
Tout dépend du lieu où je me place.
Si je me place au « bon endroit », l’invisible se fait pour moi visible.
N’est-ce pas, là, le jardin secret de Théo Brin de Paille?
Un chemin qui commencerait par la vie et finirait par la vie?
Un jardin où chaque instant, chaque pas révéleraient à l’être qui se place au « bon endroit » l’invisible ?
Thierry Rousse, Nantes, 28 décembre 2019.