Brassens avec douceur
Tu m’distrais en chemin
Quand dans mon cœur
Y’a plein de chagrin
Y’a tant d’amourettes
Quand je te lis
Tant de sourires qui
M’font la causette
Tu sais si bien faire
Vibrer mes cordes d’airs
De plaisirs coquins
Aux doigts taquins
T’es pas né à Sète
Pour de rien
Toi le poète
Toi le voyou
Aux pas si fous
Qui des monts de la vie
Avait des yeux si faim
Voulant d’un tas d’p’tits riens
En écrire tonnes de poésie
Tu détournais l’regard
Sur l’quai des filles
Vers ta douce guitare
Sous la lune qui frétille
Sur le port tu leur jouais
Ce qu’elles voulaient
Croquer aux fruits défendus
Contre leurs mœurs plutôt tendues
Tu passais à l’oeil des maris
Comme leur pire ennemi
Un collectionneur d’amantes
A l’arme nonchalante
Ta musique n’était pas rock
Pourtant frémissaient-elles sur ton roc
Se dandinant toutes cambrées
Sur ton cheval fougueux de liberté
Le vent marin
N’était pas loin
De ces sirènes
Que tu fis reines
Brassens avec chaleur
Tu m’distrais en chemin
Quand dans mon cœur
Me vint ce refrain
On t’avait envoyé à Paris
Comme un enfant maudit
On t’avait envoyé à Paris
Comme un enfant puni
C’est l’Auvergnat qui t’avait accueilli
Quand du monde tu fus refroidi
Lui qui t’donnait trois bouts de bois
Quand dans ton âme t’avais froid
Sa Jeanne te prit dans ses bras
Toi l’exilé fit son pacha
Tu la comblais de tant d’caresses
De toutes tes rimes
De tes vers d’tendresse
Elle s’enivrait jusqu’aux cimes
C’est drôle
Comme tout l’monde
A présent
Rigole
A tes poèmes
Frais comme des champs
Y’a rien d’immonde
Que des souvenirs qu’on sème
Des bêtises de jeunesse
Des p’tits tours de prouesses
Brassens avec bonheur
Tu m’distrais en chemin
Quand dans mon coeur
Y’a plus rien qu’un chagrin
P’t’être bien qu’les dieux
Sont tombés dans ton pieux
Le premier est Cupidon
A aimer tes rebonds
Toi le poète toi le sportif
De l’amour sur les récifs
Le verbe haut audacieux
J’ai trouvé ton lit licencieux
Peuplant mes nuits blanches de Félicie
De Fernande et d’Éléonore aussi
Décrétant aux solitaires
Endurcis célibataires
La bandaison
Est déclarée ouverte à toute saison
Bien que des polissons de la chanson
Y’en ait plus dans nos maisons
Leurs mots sont tous confinés dans des ordonnances
Des envies passées sous silence
Les maris n’ont plus de toi
Maintenant à se soucier guère
Maintenant qu’ton glaive adroit
Est au repos couché au cimetière
Y’a qu’les mâles des vers
Sous terre qui vivent l’enfer
Quand tu pousses dans l’noir
Ta chansonnette
Ma belle mon espoir
Ma mignonnette
Brassens avec candeur
Tu m’distrais en chemin
Quand dans mon cœur
J’écris mes parchemins
A tous ces amours
Que je n’ai pas eus
A tous ces yeux au jour
De pluie qui m’ont plu
Je tente des quatrains
Plein d’ampoules
P’t’être en vain
Sans pieds sans formalités
Juste pour m’délivrer
Dans ma tête des vents de la houle
Écarter les barreaux
De l’étreinte de mes mots
Voir au bout d’ma lorgnette
Saperlipopette
Ce ‘p’tit oiseau
Trouvant le monde tout beau
Avec toi Brassens
C’est presque toujours la fête
D’un prince
Des taudis
Qui en aimait
Sacré nom de dieu
De tous ses vœux pieux
La vie
Thierry Rousse
Nantes, jeudi 19 septembre 2024
"Une vie parmi des milliards"