Dans le fourgon
Te menant
Au Mont-Valérien
Toi et tes camarades de la Libération
Aux yeux de l’occupant
Etiez perçus comme des vauriens
Vous avez été torturés
Pour balancer vos pairs
Et toi tu n’as rien dit
Roué de coups
Le corps ensanglanté
Sur le quai de ton martyre
Entre les barreaux de votre fourgon
Tu voyais deux bouches s’unir
Dans ce Paris insouciant
Le long d’une Seine romantique
Sous des lampions aveugles et sourds
Des lèvres chantaient avec légèreté
Y’a de joie
Voulait-on nous faire croire
A cette douce félicité
A ces pluies de baisers
Quand dans les fours crématoires
Périssaient enfants et parents
Au nom de leurs origines
Au nom de leurs croyances
Quel être digne aligné au ciel
Pouvait se soumettre à de telles lois
Tourner les regards
Vers ces guinguettes
Vers ces divertissements
Quand on rasait
Dans l’indifférence
Les têtes des innocents
Quand on faisait couler impunément
Leur sève
Dans les sous-sols et les camps
Missak
Toi à l’âme intègre
T’avais quitté la poésie
Pour un juste combat
“Ivre d’un grand rêve de liberté”
Mais t’avait-t-elle au fond vraiment quitté
La liberté
Cette muse de toute beauté
Les saveurs de tes rimes
Exprimaient tes plus intimes désirs
La poésie les avait gravés sur ton cœur
Les saveurs de ces hymnes
Exprimaient tes plus profonds désirs
Tes mots avaient été publiées sur tous les murs
Et ta mémoire
Au Panthéon
Enfin avait été enfin honorée
En cette “Douce nuit d’été”
Reste ton livre
Je voudrais m’abreuver
De chacun de tes mots
Les parfums de tes origines
Me ravissent
Me délivrent
Le bonheur n’appartient pas à la haine
Le bonheur n’appartient pas à la haine
C’est ma croyance
Et tes mots offerts me sont présence
Dans le train de l’absence
La lecture de chacun de tes poèmes
Mérite à chaque instant mon attention
Un flottement au-dessus du temps
Goûter du bout des lèvres tes pensées
Avant d’y revenir
M’y plonger tout entier
L’éveil de mon désir
Un dimanche
Une matinée d’été
Attendait
Ton retour
Sur le quai d’une gare
Quelque part
Je retourne à ton combat
Pure exaltation de la beauté des sentiments
Qui peut nous assurer
Que l’horreur n’arrivera plus
Que la démocratie sera toujours bien protégée
Que les silences toujours seront brisés
Que la poésie ne finira pas en fumée
En rivières de sang
Oubliée
Thierry Rousse
Nantes, juillet 2024 et jeudi 5 septembre 2024
« Une vie parmi des milliards »
Missak Manouchian, "Ivre d'un grand rêve de liberté", Points Poésie