Le compte à rebours était lancé
Cinquante sept années
Déjà sur mille chemins avaient défilé
Si tu visais l’âge d’Edgar Morin
Il te restait quarante cinq ans à vivre
Sur les lignes de ta main
Soit au moins seize mille quatre cent vingt cinq jours
Si tu comptais tes années qu’en années communes
Tu avais donc encore un peu de temps
Marcel
Pour rencontrer ta fée
Faire fortune
Au milieu d’une forêt d’amour
Alors
Tu posais ta feuille dans un café
Ton stylo en équilibre sur ta cuillère
De quoi serait donc fait aujourd’hui ta journée
Sur la balance de tes hésitations
Sur les questions de tes choix à accomplir
Réfléchir avant d’agir
Sage décision
Réfléchir aux jours suivants
Ce que tu ferais demain
Peser le pour et le contre
Composer toujours avec le temps
Ces mots revenaient inlassablement
Comme reporter tes rêves ensoleillés
Bien trop souvent au lendemain
Tu avais encore un peu de marge sous la tempête
Tu te disais dans ton ciré jaune
En comptant dans un coin de ta tête
J’ai mille quatre vingt quinze jours
Avant de passer dans la catégorie des séniors
Ces chercheurs d’or à l’approche de la mort
Tu rencontrerais forcément un jour ta seniorita
Assise devant un thé à la Cigale
Elle serait l’Eldorado de ta vie
Ton opéra
Ta partenaire
Une trêve au milieu de toutes ces guerres
Ta moitié
Noire et blanche
Tu le savais
Soixante notes sur les planches
Ça sonnait comme une retraite
En temps d’apocalypse
Un repos bien mérité
Deux coeurs enlacés
Au cinéma du monde
Le Katorza
Ou
Une nouvelle jeunesse
Aux quatre pieds
Exaltés
Gravissant
Allègrement
Les marches de La Bouche d’Air
Avec l’ivresse de leurs trente ans
Tous leurs désirs dans le vent
Le compte à rebours était lancé
Papy Marcel
T’avais soif d’éternité
Saltimbanque
Étudiant à l’université du temps libre
Léguer au monde
Ce que la vie
De toutes tes vies
T’avait appris
A commencer par cette femme
Quand tu avais vingt ans et toutes tes dents
Tu es jeune
Tu es beau
Vas donc cueillir l’âme qui t’aime
Ne mets pas tes envies
Dans l’engrenage
D’un monde marchand
Dont tu seras toute ta vie
Dépendant
Échappe à cette rue étroite de Paris
N’entre pas dans ma prison
Cours à travers les champs
Libre
Ta colchique t’attend
Le rideau rouge se lève
Sur mille et une histoires
D’humanités
De divinités
Passées
Présentes
Et à venir
Il te reste
Marcel
A sourire
Sauver le monde
Par la force d’aimer
Le conte à rebours est lancé
Toute fin donne le départ
Un deux trois
Marcel Morin
De jour en jour
Tu rajeunis
Une chose au-moins est sûre
Commence bien ta nouvelle vie
Commence bien ta nouvelle vie
Thierry Rousse
Nantes, mercredi 16 mai 2024
"Une vie parmi des milliards"