Entre et sois ici chez toi camarade
Jette un œil au comptoir de notre rade
T’inquiète il n’y a ni faucille ni marteau
Juste un bol de soupe qui tient chaud
Ici c’est notre jolie maison nomade
Dans ton dos on n’te passera que d’la pommade
On n’aime pas vraiment les racontars
Nous les vieux zincs les vieux routards
Ici c’est l’auberge pour tous les pieds
Qui veulent déposer leurs sacs chargés
Leurs fardeaux et leurs tas de mots
Ici c’est l’hôtel où tout l’monde est beau
Où tout l’monde chante ses joies ses tristesses
Ses colères ses rêves ses ivresses
Et tant tant d’autres choses encore
Tous ces fragiles passages de la vie à la mort
Allez chante encore
Montre-moi tes accords
Ici on a – attends je reprends mon souffle- définivement cessé de compter nos pieds sur nos doigts
Ici dans l’instant d’un souffle attendu on fonctionne juste avec l’émoi de moi à toi de toi à moi
Ici jamais tu ne seras jugé.e
Ici toujours tu seras aimé.e
Au masculin au féminin
Tout ça ne fait plus qu’un
Ici tu pourras être toi-même
Dans l’éphèmère ton plus grand poème
Ici ta parole sera écoutée précieusement
Même le temps suspendra son déferlement
Ici ces quelques planches c’est comme un carré vert
Comme un hammam de nuages dans le désert
Ici c’est juste un entre soi de paille
Où l’on refait le monde vaille que vaille
En croisant toutes nos différences
En nous plongeant dans tous nos silences
Ici il n’y a ni premier ni deuxième
Que des yeux qui s’aiment
Ici ni une somme de notes
Ni une tonne de menottes
Respire ce que tu as envie de dire
Souffle le ruisseau tranquille jusqu’à tes délires
Ici ni d’excellence
Ni d’exubérance
Que celle de ton cœur
Qui déborde de bonheur
Ici c’est l’entre soi de nos vies
Où l’on sourit où l’on rit
Ici c’est un rêve que l’on vit les yeux ouverts
Les yeux dans les yeux autour d’un ou deux vers
Allez prends donc le micro
Il te portera si haut
A la cime d’un magnolia
Ou peut-être bien d’un sequoia
Crois en moi
Si tu ne crois pas en toi
Sors tes rimes joue avec tes balles et ton violoncelle
Tes cordes vocales sont mon plus beau ciel
Tu seras mon cerisier du Japon
Avec toi je verrai des mots si profonds
Et allons camarade trinquer à l’amitié
Pour toutes ces ballades semées
On a vu toi et moi tant de vies s’exprimer
Face au bruit des gens qui ont osé s’affirmer
J’existe et je dis
Je fais et je suis
Ici les doutes on a connu
Et même à trois on y a cru
On n’a rien lâché
On a tout espéré
Que les mots d’amour lancés sur cette terre
Puissent faire cesser un jour toutes les guerres
Ici de nouveaux visages ont vu nos messages briller dans la nuit
Ici leurs pieds ont poussé un soir la porte de leur peur et d’leur ennui
Ici les pieds ont osé dire à leur bouche des mots sans pieds
Ici des anges en toute liberté dans leurs phrases sont nés
Ton enfant même de ce qui l’enfermait
S’est libéré de ses murets
Et cet instant était vivant de grâce
Et ta cabane est devenue un palace
Allez chauffe Marcel
Allez chauffe Marcel
Allez encore un p’tit mot doux pour trinquer
Pioche donc dans le chapeau du cow-boy un papier
Et monte donc indien sur la plus petite scène du monde
Pour refaire en grandeur nature et de plumes le monde
Dans un entre soi de douceurs
Caresse mes oreilles de chaleur
Riz paille on
Allumons ensemble le son
Et laissons les bonnes ondes
Refaire en nous le monde
De l’Asie au Népal jusqu’en Irlande
Goûtons au goût sauvage de toutes les landes
Entre et sois ici chez toi camarade
Jette un œil au comptoir de notre rade
Regarde le soleil comme il se lève
A l’est comme à l’ouest ce n’est plus un rêve
Thierry Rousse Nantes, mercredi 20 mars 2024 "Une vie parmi des milliards"