Depuis, au moins huit ans, j’avais à coeur de créer un spectacle qui parlerait d’un jardinier et de son jardin, son potager.
Les potagers m’ont toujours attiré, surtout ces potagers où se mélangent à foison les légumes, les plantes aromatiques, les fleurs. Ces potagers où s’offrent aux regards attentifs toutes sortes de surprises. Ces potagers avec leurs sentiers sinueux, leur cabanon, leurs vieux outils, leur brouette, leur défilé de seaux en zinc du plus petit au plus grand, leur marre aux grenouilles, leur tas de bois derrière les hautes herbes, heureuse cachette des hérissons, leurs bottes de paille, le chapeau et les sabots du jardinier, leurs cerisiers pour le plus grand plaisir des oiseaux et des enfants.
J’aime la simplicité de la terre et des gens qui la cultivent, la respectent, font corps avec elle. J’aime me promener dans la campagne. J’aime retrouver cette campagne au coeur des villes grâce à ces jardins partagés qui commencent à éclore un peu partout, comme à Nantes ou à La Roche-Sur-Yon. Ces potagers apaisent mon âme. Il m’est si doux de me promener à travers leurs allées, prendre le temps de regarder. Il m’est si agréable de mettre la main dans la terre lorsque l’occasion se présente, y semer des graines, les voir grandir, cueillir leurs fruits, savourer ces tomates juteuses, échanger, partager, offrir… Me reposer entre ses bras à la chaleur de sa douceur.
Un jardin se vit.
Le plus difficile était de créer un spectacle, mettre des mots sur ce que je ressentais. D’abord je devais vivre, ressentir, jardiner, m’imprégner des potagers, rencontrer leurs jardiniers, les écouter me parler de ce qui les reliait à la terre, leur conception du travail et de la vie, leur relation sacrée au vivant. Vivre et me nourrir de mes rencontres, de mes expériences, mes échanges, mes lectures.
« Mon Pot’âgé » s’est ainsi fabriqué, improvisé, invité pas après pas, côté jardin, de découverte en découverte. Des mots se sont posés sur des pages blanches, ont pris peu à peu leur place. Un chemin s’est dessiné au fil des pages, des saisons, de l’étang à la grange. Chaque potager a apporté sa touche de couleurs, de saveurs, de poésie. Une cabane, des outils, un poulailler, un potager en forme d’escargot, une fée clochette suspendue à un arbre, une ruche, un âne, et les principaux personnages, tous ces légumes anciens, issus de lointaines contrées. Le monde était rassemblé en un jardin.
Il me restait à raconter une histoire, celle d’un jardinier qui serait le reflet des visages, des mains, des regards, des coeurs de ces jardiniers. Un jardinier qui transmettrait à un enfant son amour de la terre, son amour de la vie.
Raconter et jouer. Préserver l’enfant qui vit en nous. La vie, n’était-elle pas un grand jeu ?
Un spectacle jamais figé, toujours en mouvement. Ainsi est « Mon Pot’Agé » qui s’enrichit de chaque nouvelle rencontre, se décompose, se recompose, à l’image de la vie.
« Mon Pot’Agé » est un spectacle né dans les jardins, du désir de transmettre.
Mon « Pot’âgé » rêve d’un Jardin-Théâtre, lieu de transmission, d’amusements, de fraternité, de ressourcement, de liberté, de sérénité…
Un Jardin-Théâtre où respirer et être ensemble, loin, si loin, et si proches à la fois…
Thierry Rousse,
Nantes
Mardi 23 mars 2021