Relire
Relire les textes que j’avais écrits pendant le confinement
Les relire
Les mettre en forme
Déjà une époque révolue
Des papiers jaunis
Avait-elle existé vraiment cette époque
Certains diraient que nous avions fait un vilain cauchemar
Que nous avions fumé ou fabulé
D’autres, celles et ceux qui avaient perdu un des leurs
Diraient que cette époque tristement avait bien existé
Comme le onze septembre
Et les autres attentats qui l’avaient suivi
Relire des pages qui s’effaçaient dans le temps
Une tragédie en chassait toujours une autre
Relire tout ce que je pouvais relire
Ces notes griffonnées sur des petits carnets
Qui finiraient dans ma tombe
Ma dernière volonté
Partir avec mes mots
Relire les livres
Tous les livres
De ma vie
Les journaux
Les revues
Les bandes dessinées
Je n’aurais pas assez d’une retraite
Pourvu que ma vue
Encore me soit donnée
Relire
Ce que je pouvais relire
Quelques échanges de messages
Quelques mots d’amour
Ou d’amitié
Bien d’autres
Des quantités de mots avaient disparu
Dans l’écran de mes nuits
Des mots
Des mots bleus
Qui prenaient l’eau
Mots indélébiles
Et pourtant
Quelle âme
Qui les avait écrits
Se souvenait-elle encore
Des palpitations de son coeur
Relire le bonheur
Et le malheur
Relire tout ce qui se liait
Tout ce qu’on ignorait
De correspondances universelles
Relire mes répliques
Relire mes rôles
Tant de vies au fond
Réelles ou imaginaires
Qui se confondaient
Pousser la porte d’une annexe
Et écrire les noms de toutes ces rues
Qui accueilleraient
Mes pas
M’y faufiler
Discrètement
Et danser
Relire et danser
Oui, relire et danser
J’avais trouvé une fin provisoire
Un objectif à atteindre
Sur les sommets
Des montagnes de mots
Nantes,
Un vingt quatre janvier
Deux mille vingt trois
Nantes Métropole m’appelait
Au bout du fil
Le début d’une reconnaissance
De nos scènes ouvertes
De nos mots qui se libéraient
Des entrailles de nos chairs
Hommes
Femmes
Tout genre confondu
Au comptoir
De l’éternité
Thierry Rousse
Nantes
Mardi 24 janvier
« Une vie parmi des milliards »