Une heure d’hiver

A ton réveil ce dimanche matin

Ton téléphone indiquait neuf heures

Et ton horloge murale dix heures

Tu réfléchissais

Que se passait-t-il dans les grandes aiguilles

Une heure avait disparu dans ta maison

Qui était entré chez toi pour la voler

Elle

La fameuse heure d’hiver

Sur l’instant

Se présente

Tu souris

Elle

Est de retour

Tu la prends dans tes bras

T’éprouves cette heureuse sensation

D’avoir gagné une heure sur ta vie

Aussitôt tu bondis de ton lit

Ragaillardi

Une heure sur ta vie

C’est pas rien

Une heure sur ta vie

Et le coeur rajeuni

Tu cours emprunter ce long chemin des prés

Le ciel s’éclaircit

Ces chèvres et ces fermes

Te rappellent les temps jadis

Et tu marches

Et tu marches pensif

Vers l’infini de ton regard

Tes pas goûtent aux perles de l’aube

A l’odeur des flambées de joies

Des longues tablées d’ami.es

Des pots au feu d’autrefois

Une heure sur ta vie à midi

Tes pommettes mûrissent

Tous les arbres

Tous les oiseaux

Te saluent

Une heure gagnée sur ta vie

En sursis

C’est pas rien

La cueillette des champignons

Des bouquets de bruyère

Un panier bien garni

Une troupe de lutins anoblis

Les jeux alanguis du dimanche

Et déjà ce temps disparu

Au crépuscule venu

Le roi soleil las s’obscurcit

Et te berce à son coucher

De longues pensées mélancoliques

Déjà la nuit profonde

Et cette triste sensation

D’avoir perdu une heure de soleil sur ta vie

Les pétales d’une matinée juste frôlées

Des cendres à tes pieds

Des fermes oubliées

Où dormaient les chèvres

Dans les champs du ciel

Le chemin des arbres

Sur ton regard

S’était refermé

Un peuplier replié

Un olivier sans olives

Une heure sur ta vie

Ce n’était pas rien

Quel maître du temps

L’avait volatilisée

T’aimerais bien la retrouver

Cette heure

Au milieu des prés

Accrochée au pistil

D’une fleur endormie

Le long d’un ruisseau

Un trouble d’oubli

Que te manquait-t-il pour être heureux

L’odeur de ce feu de bois ressassée

Des tablées d’autrefois

La besogne du paysan accomplie

Le pain et le fromage partagés

Le sourire de Violaine cette femme qui t’aime

De quoi se mêle donc la cour royale

A vouloir changer nos heures

Nos simples bonheurs

En calculs savants

Qu’elle laboure plutôt sa terre

Et vive au temps de Dame Nature

Plutôt qu’au temps de ses ratures

Ce tribun hautain voudrait te soumettre à son éloquence

Te convaincre de ses projets utiles pour toi et la terre comme cette heure d’hiver

Sitôt gagnée sitôt perdue

Que le roi se fie plutôt à l’horloge de la lune

Pour plaider la cause de sa voisine

Le bon sens revient à la vie

Que l’horloge du ciel reste souveraine

Alignée à tout l’univers

Que l’automne annonce enfin une trêve

En cette heure d’hiver

Thierry Rousse
Nantes, lundi 28 octobre 2024
Une vie parmi des milliards”

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